Réforme du régime légal des droits d’auteur

30 novembre 2022

Le 18 novembre, le Conseil des ministres a approuvé en deuxième lecture un avant-projet de loi-programme contenant toute une série de nouvelles mesures. Sur le plan fiscal, le principal changement est la modification du régime fiscal existant en matière de droits d’auteur, dont le champ d’application sera désormais très limité. Au niveau de l’ONSS, quelques nouvelles dispositions relatives aux droits d’auteur ont également été prises, mais elles seront réglementées par un arrêté royal distinct.

Pourquoi l’attribution de droits d’auteur est-elle si avantageuse ?

Sur le plan fiscal, la rémunération perçue par un travailleur ou un dirigeant d’entreprise pour la cession de ses droits d’auteur est considérée (au moins en partie) comme un revenu mobilier. C’est également le cas si cette cession s’inscrit dans le cadre de l’activité professionnelle de ce travailleur ou de ce dirigeant d’entreprise.

Pour être considéré comme un revenu mobilier, le montant de ces droits d’auteur est actuellement plafonné à 64 070 € (montant indexé pour l’année de revenus 2022). Jusqu’à ce plafond, un taux d’imposition de 15 % est appliqué. Ce taux est appliqué à la rémunération perçue après déduction des éventuelles cotisations ONSS et après application d’une déduction forfaitaire de frais avantageuse : 50 % sur la tranche de revenus de 0 € à 17 090 € et 25 % sur la tranche de revenus de 17 091 € à 34 170 € (montants pour l’année de revenus 2022).

Si ce plafond est dépassé, une présomption d’assujettissement en tant que revenu professionnel s’applique, bien qu’il soit toujours possible d’apporter la preuve du contraire.

Les revenus issus de la cession sont soumis à la retenue du précompte mobilier et doivent être obligatoirement déclarés sur la fiche 281.45. Cette retenue n’étant pas libératoire, les indemnités perçues doivent toujours être déclarées dans la déclaration fiscale finale du bénéficiaire.

Nouveau régime des droits d’auteur

La charge fiscale sur les revenus issus de la cession de droits d’auteur (première tranche) est donc sensiblement plus faible que sur les revenus professionnels traditionnels (en principe soumis à des taux d’imposition progressifs). L’octroi de droits d’auteur est donc devenu de plus en plus populaire : les journalistes, profils IT, avocats, architectes et professionnels de la publicité, entre autres, sont de plus en plus nombreux à en percevoir. Au fil des années, davantage de rulings relatifs à l’octroi de droits d’auteur ont également été demandés auprès du Service décisions anticipées.

Le régime des droits d’auteur, tel qu’il a été introduit en 2008, fait actuellement l’objet d’une réforme profonde.

Restriction (considérable) du champ d’application

Le changement le plus important concerne le champ d’application du régime avantageux pour la cession de droits d’auteur, qui sera désormais fortement restreint. Le gouvernement entend en effet réserver ce régime spécifique aux revenus « perçus de manière irrégulière et aléatoire dans l’exercice d’activités artistiques ».

Revenus
Le concept de droit d’auteur sera interprété au sens du livre XI, titre 5, du Code de droit économique. Sont dès lors pris en compte uniquement les revenus :

  • découlant de la cession ou de l’octroi d’une licence, par l’ayant droit initial des droits d’auteur et des droits voisins, tel que visé au livre XI, titre 5, du Code de droit économique ou dans des dispositions analogues de droit étranger, 
  • relatifs aux œuvres littéraires ou artistiques visées à l’article XI.165 du même code ou aux exécutions publiques et aux prestations des artistes exécutants visées à l’article XI.205 du même code.

Destinataires
Le gouvernement souhaite réserver ce régime aux bénéficiaires qui sont « par nature exposés aux risques d’aléas et de précarité propres aux activités de création et de prestation de nature artistique », et donc ne pas (plus) l’ouvrir aux travailleurs qui perçoivent de manière récurrente une indemnité pour la cession de leurs droits d’auteur, en plus de leur salaire normal.

Cette condition est définie avec précision dans le projet de texte sous la forme de l’obligation pour les bénéficiaires de :

  • soit être titulaires d’une attestation du travail des arts tel que visée à l’article 6 de la loi portant création de la Commission du travail des arts et améliorant la protection sociale des travailleurs des arts (*), ou dans les dispositions analogues ou d’effet équivalent adoptées par un autre État membre de l’Espace économique européen ; 
  • soit, à défaut, céder leur œuvre protégée par le droit d’auteur à un tiers pour sa diffusion au public, pour son exécution ou sa représentation publique ou pour sa reproduction.

(*) Remarque : la commission chargée de délivrer ces attestations du travail des arts n’a, à ce jour, toujours pas été créée. Le processus législatif à cet égard n’est pas encore terminé. La base juridique a été approuvée en deuxième lecture par la commission des Affaires sociales le 18 novembre 2022 (DOC 55/2864). Jusqu’à nouvel ordre, il faudra donc se baser sur la 2e condition. La commission devrait voir le jour avant le 1er janvier 2024.

Introduction d’un nouveau plafond

Comme mentionné précédemment, la qualification de revenu mobilier s’applique actuellement à une première tranche de 64 070 € par an de revenus issus de la cession de droits d’auteur. Désormais, le non-dépassement de ce plafond sera examiné sur une base moyenne, et ce, sur les quatre périodes imposables précédant la période imposable actuelle. S’il s’avère que ce plafond a effectivement été dépassé en moyenne, le régime avantageux en matière de droits d’auteur ne sera pas applicable au cours de la période fiscale actuelle.

Par ailleurs, un nouveau plafonnement (relatif) voit le jour : le rapport entre le total des indemnités issues de la cession et de l’octroi de licences de droits d’auteur et de droits voisins et le total des rémunérations, qui comprend également le salaire pour les prestations fournies, ne doit pas dépasser 30 %.

Entrée en vigueur

Ces dispositions entreront en vigueur le 1er janvier 2023 et s’appliqueront aux revenus payés ou octroyés à partir du 1er janvier 2023 au cours d’une période imposable associée, au plus tôt, à l’exercice d’imposition 2024. 

Régime de transition

Pour donner à chacun la possibilité d’adapter les contrats existants aux nouvelles dispositions, un régime de transition a été mis en place :

  • Le plafond relatif de 30 % est porté (en règle générale) à 50 % pour l’exercice d’imposition 2024 et à 40 % pour celui de 2025. Dès l’exercice d’imposition 2026, le taux final de 30 % sera appliqué.
  • Le traitement fiscal actuel sera maintenu pendant une année supplémentaire pour les contribuables imposés sur les revenus des droits d’auteur pour l’exercice d’imposition 2023 qui ne seront pas éligibles au nouveau régime à partir de l’exercice d’imposition 2024. Les plafonds pour la qualification de revenus mobiliers et pour la déduction forfaitaire de frais seront quant à eux réduits de moitié. Ainsi, après cette année de transition, les contribuables qui ne remplissent pas les nouvelles conditions seront irrévocablement exclus du régime fiscal avantageux en matière de droits d’auteur.

Source:
Projet de loi-programme (DOC 55/3015).

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