Vers une pension complémentaire égale pour les ouvriers et les employés

16 février 2024

Dans la pratique, certaines différences subsistent encore entre les plans de pension des ouvriers et ceux des employés. Cela étant, il y a une dizaine d’années, le gouvernement a introduit le principe de l’égalité de traitement entre les travailleurs ouvriers et les employés, y compris en matière de pensions complémentaires. L’égalité en matière de pension complémentaire pour les travailleurs ouvriers et employés devrait ainsi être atteinte d’ici 2030.

2030, la ligne d’arrivée

La loi du 26 décembre 2013 concernant l’introduction d’un statut unique entre travailleurs ouvriers et employés a posé les premiers jalons d’une harmonisation des deux statuts. L’élimination des différences majeures en matière de constitution des délais de préavis entre travailleurs ouvriers et employés était une des mesures qui ont découlé de cette loi. Le 1er janvier 2014, la constitution des délais de préavis est ainsi devenue identique pour les travailleurs ouvriers et employés. 

À la suite de cette loi, les autorités se sont également penchées sur les différences qui existaient entre les travailleurs ouvriers et employés en matière de pensions complémentaires. 

La loi du 5 mai 2014 a alors prévu l’abolition de toute discrimination entre les travailleurs ouvriers et employés en ce qui concerne leurs pensions complémentaires. Une harmonisation a de ce fait été progressivement mise en place. À l’origine, les différences devaient être totalement éliminées d’ici 2025, mais cette échéance a été repoussée à 2030, notamment en raison de la pandémie de coronavirus.

À terme, d’ici à 2030, chaque employeur individuel occupant à la fois des travailleurs ouvriers et employés devra donc s’assurer d’avoir éliminé toute différence de traitement en matière de pensions complémentaires entre ces deux statuts. Toutefois, comme les pensions complémentaires sont principalement réglementées au niveau sectoriel, c’est d’abord aux secteurs qu’il incombe de gommer ces différences. 

Récapitulatif

La période allant jusqu’au 1er janvier 2015 inclus

Les différences de traitement existantes entre les travailleurs ouvriers et employés sont considérées comme non discriminatoires jusqu’en 2014. Nous laissons pour ainsi dire de côté cette période. 

La période allant du 1er janvier 2015 au 1er janvier 2030

Il s’agit de la période de transition, également appelée période de « standstill ». 

Pendant cette période, aucune nouvelle différence ne peut être introduite entre les ouvriers et employés en termes de pension complémentaire d’un même secteur ou d’une même activité d’entreprise, à moins qu’une telle différence de traitement ne soit nécessaire pour éliminer une distinction existante.  

Dans le même temps, les différences existantes ne doivent pas être accentuées. 

La période à partir du 1er janvier 2030

Cette période est la période de clôture, il s’agit de la date butoir (« cutoff date»). À partir de cette date, plus aucune différence de traitement ne pourra subsister entre les travailleurs ouvriers et employés. Les différences qui subsisteraient constitueraient dès lors une discrimination. 

Que doit-il se passer pendant la période de transition (2015-2030) ?

Au cours de la période de transition, il incombe principalement aux secteurs d’éliminer les différences existantes. Il s’agit des secteurs qui prévoient une pension complémentaire et qui ont également un régime de pension complémentaire dans leur commission paritaire miroir qui y déroge. Tel est notamment le cas de la CP 118 pour les travailleurs ouvriers de l’industrie alimentaire et sa CP 220 miroir pour les travailleurs employés. Ces secteurs devront donc entamer des négociations et, à terme, un protocole d’accord devra définir comment, selon quelles modalités et par quelle voie ils prévoient d’éliminer les différences. 

Ces protocoles d’accord devront être intégrés dans une CCT sectorielle au plus tard en 2026. Concrètement, cette CCT devra être déposée au greffe du SPF Emploi au plus tard le 1er janvier 2027.

Il incombera ensuite aux employeurs individuels de se conformer aux CCT qui s’appliquent à eux. Ils disposeront alors de deux années supplémentaires pour adapter leurs plans d’entreprise, le cas échéant. 

Éléments importants à prendre en compte pour les employeurs

En tant qu’employeur, vous avez tout intérêt à vous renseigner sur la situation actuelle dans votre secteur. En effet, certains secteurs ont déjà entrepris des démarches en vue d’éliminer toute forme de discrimination dans les plans de pensions complémentaires. Tel est le cas du secteur de la construction (CP 124) qui a élaboré une CCT en 2023 afin d’identifier les travailleurs employés de la commission paritaire auxiliaire pour les employés (CP 200) appartenant à une entreprise de construction. Ces travailleurs employés de la construction prendront part à un régime de pension complémentaire sectoriel à partir de 2023, ce qui constitue une première étape vers un régime harmonisé pour tous les travailleurs du secteur. 

Si les travailleurs ouvriers et/ou les employés sont déjà affiliés à un plan de pension au niveau de l’entreprise, il serait par ailleurs utile pour les employeurs de rassembler les règlements de pension et d’identifier les principales caractéristiques de ce plan. Les employeurs pourront ainsi comparer ces caractéristiques avec les démarches et les formalités déjà effectuées par leur secteur. 

Pour information, en tant qu’employeur, vous pouvez demander votre/vos régime(s) de pension auprès de votre organisme de pension ou le(s) télécharger vous-même sur le site suivant :  https://pensionpro.be/fr.  

Par ailleurs, en tant qu’employeur, vous devez également faire attention si vous souhaitez introduire un nouveau plan de pension pour votre personnel. Si vous offrez déjà le même régime de pension aux travailleurs ouvriers et employés, il n’y a de toute façon pas de problème. À cet égard, veuillez noter qu’en tant qu’employeur, vous pouvez continuer à opérer une distinction entre certaines catégories de personnel, à condition que cette différence de traitement ne soit pas purement fondée sur la nature du travail et que vous puissiez prouver que certains groupes de personnel ne se trouvent pas dans une situation similaire. Vous devez également veiller à ce qu’il n’y ait pas de discrimination indirecte. C’est notamment le cas lorsque l’on utilise un critère qui n’est pas purement basé sur la nature du travail, mais qui signifierait quand même indirectement que les travailleurs ouvriers et employés ne bénéficieraient pas du même engagement de pension. 
Néanmoins, une exception est toujours prévue et possible dans le cadre du « droit de refus » du travailleur individuel. En effet, le travailleur a toujours la possibilité de décider de ne pas s’affilier à un nouveau régime de pension complémentaire ou à un régime modifié. 

Sources :

  • Loi concernant l’introduction d’un statut unique entre ouvriers et employés en ce qui concerne les délais de préavis et le jour de carence ainsi que les mesures d’accompagnement, MB 31 décembre 2013
  • Loi portant modification de la pension de retraite et de la pension de survie et instaurant l’allocation de transition dans le régime de pension des travailleurs salariés et portant suppression progressive des différences de traitement qui reposent sur la distinction entre ouvriers et employés en matière de pensions complémentaires, MB 09/05/2014
  • Loi exécutant l’accord social dans le cadre des négociations interprofessionnelles pour la période 2021-2022 (1), MB 31/12/2021

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